C’est officiel. Depuis ce mois de juillet 2025, l’Algérie applique une réforme majeure de son régime de change. Chaque citoyen algérien peut désormais bénéficier d’une allocation touristique de 750 euros, contre à peine 100 euros auparavant. Une avancée attendue de longue date, qui pourrait redéfinir la relation des Algériens à la mobilité internationale.
Pendant longtemps, l’allocation touristique en Algérie était un sujet de frustration pour les voyageurs. Obtenir quelques euros de manière officielle relevait presque du parcours du combattant. En juillet 2025, un tournant est enfin amorcé. Désormais, les Algériens peuvent bénéficier d’une enveloppe annuelle de 750 euros, accordée par les banques publiques, sur présentation d’un simple billet d’avion. Une mesure qui suscite autant d’intérêt que de questions, notamment sur sa portée réelle, ses conditions et son impact sur le marché noir du change.
Un tournant symbolique dans la politique monétaire algérienne
C’était une revendication persistante, relayée autant par les citoyens que par les acteurs économiques, revoir à la hausse le montant dérisoire de l’allocation touristique, figé depuis des décennies à un plafond de 15 000 dinars, soit moins de 100 euros. En ce mois de juillet 2025, le gouvernement algérien franchit enfin le pas. Le nouveau montant annuel est fixé à 750 euros par citoyen majeur, à condition de justifier d’un titre de voyage valide.
Selon des sources proches du ministère des Finances, cette mesure fait suite aux recommandations issues des assises nationales sur la réforme financière, tenues en décembre 2024, où l’accès équitable aux devises a été identifié comme un levier crucial pour rétablir la confiance dans le système bancaire et réduire la dépendance au marché noir.
Qui est concerné ? Quelles conditions ?
L’allocation s’adresse à tous les citoyens algériens majeurs, disposant d’un passeport valide et d’un titre de voyage confirmé (billet d’avion ou de bateau). Elle est versée une seule fois par an, sous forme d’un achat de devise au guichet officiel des banques agréées, au taux fixé par la Banque d’Algérie.
Contrairement à certaines attentes, aucun quota familial n’a été annoncé à ce stade, chaque adulte doit effectuer la démarche individuellement. Le retrait s’effectue exclusivement en euros (et non en dollars), en conformité avec les destinations principalement choisies par les voyageurs algériens.
Un impact direct sur le marché noir du change ?
Cette mesure vise-t-elle à tarir les sources d’approvisionnement en devises sur le marché parallèle ? C’est en tout cas une étape vers la régulation partielle d’un système officieux qui prospérait depuis des années face à l’inaccessibilité bancaire.
Aujourd’hui, un euro se négocie à 270 dinars sur le marché noir, contre un taux officiel tournant autour de 153 dinars. Avec 750 euros par an au taux officiel, le gain pour les citoyens est symbolique… mais la démarche vise surtout à reconstruire une relation de confiance avec les institutions financières nationales.
« Ce n’est pas une révolution, mais c’est un signal fort », analyse un économiste à Alger. « C’est la première fois que l’État reconnaît publiquement que les Algériens ont besoin de devises dans un cadre légal et transparent. »
L’annonce intervient dans un climat social sensible, alors que l’été coïncide avec une hausse massive des voyages à l’étranger, notamment vers la Tunisie, la Turquie, la France et l’Espagne. Nombreux sont les citoyens à avoir réservé leurs vacances sans espoir d’obtenir des euros légalement. Cette réforme leur offre désormais une possibilité légale, même limitée, d’accéder à la monnaie étrangère.
Par ailleurs, certains observateurs y voient une tentative d’apaisement de la diaspora algérienne, très critique sur les conditions d’accès aux services bancaires lors de ses séjours au pays. Ce geste pourrait servir à améliorer l’image de l’État auprès des Algériens de l’étranger, en quête de réformes concrètes.
Ce qui reste à clarifier concernant l’allocation touristique de 750 euros
Malgré l’annonce de l’entrée en vigueur de la mesure, plusieurs zones d’ombre subsistent. On ignore encore :
- si des plateformes en ligne permettront de réserver ou de prévalider la demande ;
- comment les banques comptent gérer les files d’attente et la demande massive en période estivale ;
- si des mécanismes de suivi seront instaurés pour éviter les fraudes ou les reventes illégales.
En l’absence de communication officielle détaillée sur le déroulement pratique de l’opération, des files se sont déjà formées devant certaines agences bancaires, et des témoignages d’usagers confus ou refoulés commencent à circuler sur les réseaux sociaux.
L’allocation touristique de 750 euros constitue une avancée incontestable dans le paysage monétaire algérien. Mais elle reste symbolique face à la réalité des prix et à la situation du dinar. Un billet d’avion pour l’Europe, une nuit d’hôtel, ou une consultation médicale à l’étranger absorbent souvent l’intégralité de cette somme.
Pour qu’elle ait un véritable impact, il faudra aller plus loin, réviser les taux de change, fluidifier les démarches, et surtout bâtir un système bancaire moderne, transparent et accessible à tous.