En Algérie, la lutte contre le marché noir monte d’un cran. De multiples opérations ciblées révèlent un système organisé de trafic de devises et de faux billets, mettant en lumière des réseaux bien implantés et des pratiques à fort impact sur l’économie nationale.
Le marché parallèle de la devise ne faiblit pas. Sur le terrain, les services de sécurité mènent une série d’interventions musclées, révélant non seulement l’ampleur du phénomène, mais aussi sa complexité. Blanchiment d’argent, fausse monnaie, fraude fiscale… autant de crimes économiques liés à un marché noir de plus en plus structuré.
Face à l’instabilité économique, au manque de liquidités en devises et à la pression sur le dinar, les circuits informels prennent de l’ampleur. Ce climat profite aux réseaux criminels, qui exploitent les failles du système pour développer leurs activités en marge des institutions financières. Les autorités, elles, tentent de rattraper ce retard par des actions visibles et coordonnées.
Lutte contre le marché noir et démantèlement des circuits illicites
Ces derniers mois, plusieurs affaires ont remis en lumière la portée du trafic de devises. À Tizi-Ouzou, plus de 3,4 milliards de centimes en dinars algériens et 55 700 euros en liquide ont été saisis dans une opération conjointe entre la brigade économique et financière et la police judiciaire d’Azazga. Cinq personnes ont été arrêtées, soupçonnées notamment de blanchiment d’argent, de fraude fiscale, et d’infraction à la réglementation sur les mouvements de capitaux.
Six véhicules ont également été confisqués. Même si leur implication directe dans les activités illicites n’a pas été détaillée, leur présence dans l’affaire témoigne d’un niveau logistique non négligeable. L’intervention, autorisée par le procureur d’Azazga, s’inscrit dans une série d’actions similaires menées à travers le pays.
À Blida, en mars 2025, une autre saisie impressionnante a permis de récupérer 41 milliards de centimes, plus de 90 000 euros, 1 150 dollars américains, 645 riyals saoudiens ainsi que six voitures de luxe. Ce type d’opération, au-delà de la quantité d’argent interceptée, reflète la stratégie des autorités de renforcer le contrôle des flux financiers*hors des canaux réglementés.

Fausse monnaie et criminalité financière en forte progression
Autre terrain sensible dans cette lutte : la circulation de fausse monnaie, en nette recrudescence. À Alger, la brigade mobile de Baba Ali a récemment mis la main sur plus de 105 000 euros en faux billets, en plus de matériel de falsification, d’armes blanches et d’un véhicule. Cinq personnes ont été arrêtées, accusées de faire partie d’un réseau de falsification de devises étrangères.
Dans un autre dossier traité à Sétif, les services de police ont saisi, en avril 2021, plus de 10 millions d’euros en faux billets, suite à une enquête ayant permis de localiser trois suspects issus d’une wilaya frontalière. Les billets étaient destinés à être injectés sur le marché noir des devises, preuve que la contrefaçon monétaire reste une source lucrative pour certaines organisations.
Le lien entre falsification et autres crimes économiques est parfois plus direct qu’on ne l’imagine. À Alger, trois ressortissants étrangers ont été arrêtés pour possession de faux dollars américains et exploitation d’un local de prostitution. L’enquête a montré une imbrication entre trafic de monnaie, proxénétisme et immigration clandestine, illustrant la porosité entre les différents types de criminalité financière.
Surveillance des devises et contrôle du change informel
Ces différents cas mettent en évidence les failles persistantes dans le contrôle des flux financiers. Les autorités algériennes accentuent donc leurs efforts pour assainir les circuits de change, en misant sur une meilleure traçabilité des transferts, en particulier ceux réalisés en dehors du système bancaire classique.
Parallèlement, les initiatives se multiplient pour limiter le recours aux plateformes de transfert illégales ou aux réseaux clandestins de change qui échappent aux règles en vigueur. L’un des objectifs majeurs reste la restauration de la confiance dans les institutions financières et le renforcement des mécanismes de régulation afin de dissuader les acteurs économiques de se tourner vers l’informel.
L’approche adoptée combine actions répressives, coopérations interservices et sensibilisation. Elle s’appuie aussi sur des partenariats internationaux pour faciliter les échanges d’informations et identifier les flux transfrontaliers suspects.
Dans les centres urbains et les wilayas périphériques, la vigilance reste de mise. La circulation parallèle de devises, les réseaux de falsification et les trafics organisés forment un maillage dense que les autorités s’efforcent de dénouer, opération après opération.