La diaspora algérienne en France est au cœur de nouvelles orientations politiques discutées à Paris. Des déclarations officielles font état de mesures spécifiques à venir à l’encontre d’une partie de cette communauté, sur fond de tensions diplomatiques entre les deux pays.
Depuis l’été 2024, les relations bilatérales entre Alger et Paris se sont dégradées à un rythme soutenu. L’accumulation de décisions unilatérales, d’expulsions de diplomates et de rappels d’agents a installé une logique de confrontation. Ce bras de fer diplomatique, initialement contenu dans les canaux institutionnels, semble désormais s’élargir à un terrain plus sensible : celui des populations binationales et des immigrées.
Les premières indications d’un durcissement à l’encontre de la diaspora sont apparues à la suite du dernier Conseil des ministres français. À la sortie de la réunion, la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas, a évoqué sans détours des « dispositions plus importantes » ciblant une partie de la communauté algérienne établie en France. Une formulation vague, mais suffisamment explicite pour susciter l’inquiétude.
Des mesures envisagées contre la diaspora algérienne en France
L’annonce de possibles décisions affectant directement la diaspora algérienne en France intervient dans un contexte marqué par une réponse symétrique entre les deux États. La France a récemment décidé l’expulsion de plusieurs diplomates algériens, en réaction au renvoi d’agents français exerçant en Algérie dans des conditions jugées irrégulières par Alger.
Ce climat de réciprocité dans les sanctions diplomatiques se traduit désormais par une nouvelle orientation. D’après les propos de Primas, le président, le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères français seraient engagés dans l’élaboration de mesures ciblées à l’égard d’Algériens résidant sur le territoire français. Le flou persiste quant à la nature exacte de ces dispositions. Mais l’hypothèse d’un réexamen de certains accords bilatéraux, notamment celui de 2013 sur les exemptions de visas pour détenteurs de passeports diplomatiques, revient avec insistance.
Conséquences pour les résidents algériens et franco-algériens
La perspective de telles mesures a provoqué une mobilisation immédiate parmi les représentants de la communauté algérienne en France. Plusieurs figures de la communauté franco-algérienne ont pris la parole pour exprimer leur refus de voir la diaspora algérienne instrumentalisée dans un affrontement politique entre États.
Omar Jellil, président de la Fédération des Algériens de Marseille, a qualifié les déclarations gouvernementales françaises d’atteinte à l’État de droit. Il estime qu’il s’agit d’une tentative de pression indirecte sur Alger, en s’attaquant à des citoyens n’ayant aucun lien opérationnel avec la diplomatie. Selon lui, la diaspora, estimée à plusieurs millions de personnes, continue de maintenir un lien fort avec l’Algérie, et ne peut être réduite à un levier diplomatique.
Les réseaux sociaux ont également vu émerger une vague de soutien à l’Algérie de la part de nombreux Franco-Algériens. Cette mobilisation numérique souligne la sensibilité du sujet et la place stratégique de cette population dans les équilibres politiques des deux pays.

Une communauté exposée à de nouvelles incertitudes
L’inquiétude gagne aussi les rangs des parlementaires représentant les Français d’origine algérienne. Pour Saad Laanani, député de la 9e circonscription des Français établis hors de France, les propos de la porte-parole du gouvernement constituent un tournant préoccupant. Il parle d’un « signal fort » adressé à la communauté algérienne, susceptible de créer un climat d’instabilité sociale et juridique.
D’un point de vue juridique, certains spécialistes du droit international évoquent déjà le risque d’une remise en cause de la protection des droits fondamentaux des binationaux. Toute mesure ciblant une population sur des critères d’origine ou de lien supposé avec un pays tiers pourrait soulever des contentieux devant les juridictions européennes.
En parallèle, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a déclaré sur les plateaux télé que « rien n’est exclu », confirmant ainsi l’ouverture de nouvelles pistes d’actions politiques. Si aucun détail concret n’a encore filtré, les indications convergent vers un traitement différencié de certains profils issus de la diaspora, notamment ceux actifs dans les sphères institutionnelles, culturelles ou économiques.
La communauté algérienne en France reste à ce jour l’une des plus importantes diasporas extra-européennes. Sa situation est désormais placée au centre d’un contentieux diplomatique majeur, révélant la fragilité du statut de millions de citoyens partagés entre deux États liés par l’histoire, mais éloignés par les tensions du moment.