Dans les Hauts-de-Seine, la préfecture impose aux sans-papiers des « interros surprises » lors de leurs démarches administratives. Ces tests, qui portent sur des questions de culture générale ou sur la vie personnelle des individus, sont imposés sans cadre légal clair, suscitant des interrogations sur leur légitimité et leur objectif.
En France, la préfecture joue un rôle central dans l’application des politiques migratoires. Elle est l’intermédiaire direct entre l’État et les administrés sur les questions de séjour, d’asile, de naturalisation ou d’éloignement. Dans le département des Hauts-de-Seine, comme ailleurs, c’est elle qui traite les demandes de titres de séjour, les régularisations, les renouvellements, et les recours gracieux.
La préfecture dispose d’un pouvoir d’appréciation, aussi appelé pouvoir discrétionnaire, notamment pour ce qui concerne les admissions exceptionnelles au séjour (AES). Ce pouvoir, bien qu’encadré par des textes (comme le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile – CESEDA), donne aux agents préfectoraux une certaine latitude pour décider d’accorder ou non un titre de séjour.
Mais cette marge de manœuvre soulève une problématique : jusqu’où peut aller l’interprétation des textes ? L’exemple des « interrogatoires surprises » semble illustrer une forme d’élargissement de ce pouvoir, non prévu par la loi. Poser des questions personnelles sans lien direct avec les critères de régularisation peut donc être perçu comme une déviation du cadre légal.
Une préfecture impose aux sans-papiers interros surprises
Le 20 avril 2025, Mediapart a révélé que des agents de la préfecture soumettent les usagers en situation irrégulière à ces interrogations, parfois en dehors de tout cadre légal. Des témoins ont qualifié ces pratiques de « déloyales », tandis que la préfecture a assumé ces méthodes. Inès*, une élève avocate, a relaté une expérience où elle a accompagné une personne sans-papiers à la préfecture pour une demande d’admission exceptionnelle au séjour (AES). À leur arrivée, l’usager a été soumis à une série de questions sur sa vie personnelle, sans lien apparent avec sa demande administrative.
Ces « interros surprises » soulèvent des questions sur le respect des droits des personnes sans-papiers et sur la transparence des procédures administratives. Alors que la régularisation des travailleurs sans-papiers reste un sujet sensible, de telles pratiques peuvent être perçues comme une entrave à l’accès équitable aux droits et services publics.
Les associations de défense des droits des étrangers, telles que le Collectif des Sans Papiers des Hauts-de-Seine (CSP92), dénoncent régulièrement les conditions d’accueil des étrangers dans le département. Elles pointent du doigt des pratiques administratives opaques et des traitements inéquitables réservés aux personnes en situation irrégulière. Ces « interros surprises » viennent s’ajouter à une liste déjà longue de préoccupations concernant le traitement des sans-papiers dans les Hauts-de-Seine.
Face à ces pratiques, il est essentiel de rappeler que l’accès aux droits fondamentaux, tels que le droit à une procédure transparente et équitable, ne devrait pas être conditionné à des tests non prévus par la loi. Les autorités compétentes sont appelées à clarifier le cadre juridique entourant ces interrogations et à garantir que les droits des personnes sans-papiers soient respectés dans toutes les démarches administratives.
Légalement, aucun texte ne prévoit d’évaluer un demandeur de titre de séjour sur sa culture générale, ses habitudes de vie ou son intégration de manière orale et non formalisée. Les pièces exigées pour une AES sont claires : preuves de présence en France, d’activité professionnelle, de liens familiaux ou de contribution à la société.
L’association GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigrés) rappelle que les entretiens doivent uniquement porter sur l’instruction du dossier, pas sur la « moralité » ou l' »intelligence » du demandeur. Les pratiques rapportées dans les Hauts-de-Seine interrogent donc sur une possible dérive administrative. Cela nuit non seulement aux personnes concernées mais aussi à la confiance globale dans les institutions.