L’euro numérique entre dans une phase concrète avec la collaboration entre la BCE et le protocole COTI, axée sur la confidentialité des paiements. Ce partenariat marque une avancée significative vers un système monétaire numérique plus transparent, mais respectueux de la vie privée des citoyens européens.
Alors que la course mondiale aux monnaies numériques de banques centrales s’intensifie, l’Europe avance avec prudence mais détermination. Après plusieurs phases exploratoires, la Banque centrale européenne vient d’officialiser un partenariat stratégique avec un acteur spécialisé, COTI, pour renforcer la dimension confidentielle de son futur euro numérique.
Cette initiative s’inscrit dans un contexte où la protection des données personnelles est devenue un enjeu central dans les systèmes de paiement numériques. L’idée n’est pas seulement de concurrencer les stablecoins déjà bien installés aux États-Unis, mais d’offrir aux citoyens européens un outil fiable, sécurisé et aligné sur les valeurs fondamentales de transparence et de souveraineté monétaire.

Euro numérique et confidentialité des paiements
Le mot d’ordre de cette collaboration est l’intégrer la confidentialité au cœur du système. COTI, retenu par la BCE pour ses capacités technologiques, va développer un système de paiements conditionnels permettant de vérifier la provenance des actifs sans exposer les données sensibles de l’utilisateur. Cette approche, dite « on-chain », repose sur une technologie cryptographique avancée : les « Garbled Circuits », déjà éprouvée lors du projet de shekel numérique conduit avec la Banque d’Israël.
Dans ce schéma, la traçabilité des fonds reste possible, ce qui répond aux impératifs réglementaires et à la lutte contre le blanchiment, mais les informations personnelles sont protégées. Ce compromis pourrait répondre aux attentes d’une population européenne de plus en plus soucieuse de la protection de ses données tout en rassurant les autorités financières.
Une avancée européenne face aux stablecoins américains
Dans un paysage monétaire où les stablecoins privés gagnent du terrain, notamment aux États-Unis où leur cadre légal est désormais bien établi, l’Union européenne prend une autre direction. L’euro numérique, en tant que monnaie numérique publique, entend rester sous le contrôle des institutions centrales tout en proposant une alternative crédible et accessible.
Avec l’entrée de COTI dans le processus, la BCE entend accélérer le calendrier et offrir une réponse technique aux questions restées en suspens : qui contrôle les données ? Quels mécanismes de vérification sont mis en place ? Quelle place pour la vie privée dans les transactions du quotidien ? Autant d’enjeux cruciaux pour que la monnaie numérique européenne ne se contente pas d’être une simple version digitale de la monnaie actuelle.
Technologie des MNBC et rôle stratégique de COTI
Le choix de COTI n’est pas anodin. Spécialiste reconnu des monnaies numériques de banques centrales (MNBC), le protocole s’est déjà illustré avec des solutions robustes dans d’autres contextes nationaux. Cette expérience consolide son rôle dans le développement d’un euro digital respectant les standards européens, tout en apportant une dimension innovante autour des paiements sécurisés et de la programmabilité des transactions.
Le PDG de COTI, Shahaf Bar-Geffen, a souligné l’importance stratégique de la confidentialité dans l’évolution du Web3 et des infrastructures financières. Pour la BCE, cette alliance permet de s’appuyer sur un acteur capable de concrétiser ses exigences techniques, sans compromettre les valeurs européennes de protection des droits fondamentaux.

Une trajectoire encore en construction
Si ce premier pas officiel marque une nouvelle étape, le chantier reste immense. L’implémentation effective de l’euro digital dépendra non seulement des avancées technologiques, mais aussi des choix politiques à venir. La mise en œuvre du système de paiements conditionnels devra être validée, testée, puis adaptée aux différents usage, partant du commerce de proximité aux transferts transfrontaliers.
La BCE poursuit ses travaux dans un cadre méthodique, sans calendrier précipité, mais avec une volonté claire de faire de la monnaie numérique européenne un outil de résilience économique et de souveraineté monétaire européenne. D’ici là, les marchés observent attentivement, à l’image du cours du jeton COTI qui a bondi de 6 % à l’annonce du partenariat, atteignant 0,07785 $. Ce mouvement symbolique, est révélateur de l’attention grandissante portée à cette nouvelle ère monétaire.