La franchise bagages utilisée à des fins commerciales va connaître un tournant réglementaire en Algérie. Le gouvernement souhaite encadrer les pratiques actuelles d’importation individuelle, longtemps tolérées, mais non régulées, en particulier celles menées par les jeunes impliqués dans le commerce dit du « cabas ».
Depuis des années, des milliers de jeunes Algériens, souvent sans accès aux circuits officiels du commerce extérieur, importent à titre personnel de petites quantités de marchandises via les ports et aéroports du pays. Ces activités se situent dans une zone grise du droit douanier, où la franchise bagages permettait de contourner les formalités classiques. Mais ce modèle informel, bien que répandu, entraîne régulièrement des litiges, des saisies de biens et des pertes économiques.
Le président Abdelmadjid Tebboune a ordonné une mise à jour complète de cette situation. Objectif : intégrer ces importateurs autonomes dans une logique réglementée, avec un cadre juridique clair, des règles fiscales adaptées et une protection administrative. Un changement de cap qui pourrait impacter directement les conditions d’utilisation de la franchise bagages par les voyageurs pratiquant ce micro-commerce.
Franchise bagages et importation personnelle sous encadrement réglementaire
L’utilisation de la franchise bagages comme outil d’importation à petite échelle va être redéfinie. Les autorités vont officialiser l’existence d’un nouveau statut : celui d’agent économique individuel. Ce cadre permettra aux jeunes commerçants du cabas de sortir de l’informalité sans passer par les démarches complexes d’importation classique.
Concrètement, cela signifie que les personnes concernées ne seront plus traitées comme de simples voyageurs, mais comme des acteurs économiques à part entière. Ce changement de statut devrait leur ouvrir droit à des avantages fiscaux, à une couverture sociale et à un accès aux procédures d’importation simplifiées, tout en respectant les réglementations en vigueur.
Un comité interministériel, dirigé par le Premier ministre, a reçu pour mission de déterminer les conditions d’application de ce nouveau cadre. Il s’agira notamment d’élaborer des critères précis pour identifier les importateurs concernés, de fixer les quantités autorisées et de dresser une liste de produits éligibles à l’importation dans le cadre de ce dispositif.
Sélection des produits et statut des micro-importateurs
Une autre mesure centrale annoncée est l’élaboration d’une liste restreinte de marchandises autorisées dans ce cadre. L’État souhaite éviter les dérives tout en maintenant la souplesse qui a fait le succès du modèle du cabas. Il s’agit de permettre l’importation de biens de consommation à faible impact douanier, mais à forte demande sur le marché local.
La logique de cette liste repose sur deux axes : répondre à des besoins économiques concrets et respecter les normes douanières algériennes. Certains produits, considérés comme stratégiques ou sensibles, pourraient être exclus. D’autres, comme le textile, les petits équipements, les accessoires ou certains produits alimentaires conditionnés, devraient être admis sous des volumes limités.
Pour bénéficier du régime, les importateurs devront probablement être immatriculés sous le statut d’entrepreneur individuel, déjà existant dans le droit algérien. Ce statut pourrait servir de base légale à la reconnaissance de leur activité et éviter les risques de confiscation qui, jusqu’ici, accompagnaient régulièrement les retours des jeunes commerçants des ports et des aérogares.
Ports et aéroports comme zones de mise en œuvre
Les principales zones concernées sont bien sûr les aéroports internationaux d’Algérie ainsi que les ports desservant les liaisons maritimes avec l’Europe. Ces points d’entrée verront leurs procédures adaptées, afin de distinguer plus clairement les voyageurs classiques des opérateurs reconnus dans le cadre du nouveau dispositif.
Jusqu’à présent, les contrôles douaniers ne faisaient pas de différence entre un particulier transportant des biens pour usage personnel et un jeune commerçant introduisant, dans ses bagages, des articles destinés à la vente. C’est ce flou qui sera levé avec la réforme annoncée. Les agents des douanes recevront des consignes spécifiques pour gérer ces nouveaux profils en conformité avec les nouvelles directives.
Le gouvernement algérien veut faire de cette régularisation un levier de formalisation économique. À travers l’encadrement de la franchise bagages, il s’agit aussi de reconnaître un modèle d’activité qui s’est installé dans les faits, sans pour autant l’avoir institutionnalisé. Le « cabas » sort de l’ombre, désormais à l’agenda des réformes.
