Trois mois après la décision présidentielle de régulariser l’activité des micro-importateurs, l’Algérie franchit une autre étape avec une instruction interministérielle qui clarifie les conditions d’exercice des Importateurs au cabas. Objectif, transformer un commerce toléré mais informel en une filière légale, fiscalisée et connectée au système bancaire.
Ils partaient avec une valise presque vide et revenaient chargés de produits introuvables ici. Cette pratique, surnommée « importation au cabas », a longtemps échappé à tout cadre officiel. Mais ce petit commerce itinérant, symbole d’ingéniosité dans un marché en tension, change de visage. Une instruction interministérielle publiée le 27 août 2025 vient encadrer cette économie parallèle, offrant aux micro-importateurs une reconnaissance inédite… et un lot de règles à respecter.
Une réforme pour encadrer et fiscaliser la micro-importation
Longtemps associée aux voyages individuels et aux valises remplies de marchandises, l’importation du cabas devient une activité à part entière. La publication du décret exécutif n°25-170 du 28 juin 2025 avait posé les bases de ce nouveau régime. Avec l’instruction signée le 27 août par quatre ministères, le cadre devient désormais pleinement opérationnel.
Cette note détaille les modalités pratiques, inscription obligatoire sur la plateforme www.anae.dz, dépôt en ligne des demandes de licences, déclaration des opérations et suivi des flux financiers via les banques agréées. Elle met également fin aux pratiques opaques, en intégrant ces micro-entrepreneurs dans le réseau officiel de contrôle et de fiscalisation.
Carte professionnelle et plafonds financiers stricts
Chaque importateur devra obtenir une carte de micro-entrepreneur, délivrée par l’ANAE, et une licence générale du ministère du Commerce extérieur. L’instruction fixe un plafond de 1,8 million de dinars par déplacement (environ 12 000 euros), payable exclusivement via un compte bancaire domicilié en Algérie.
Les paiements en espèces ou par circuits parallèles sont désormais interdits, afin de lutter contre la fuite des devises et d’améliorer la traçabilité financière.
Les importateurs peuvent effectuer deux opérations par mois maximum. Chaque transaction est soumise à un droit de douane fixe de 5% et à un régime fiscal adapté.
Importateurs au cabas, produits interdits et sanctions
Pour éviter les abus et protéger certains secteurs sensibles, une liste noire des produits interdits a été publiée. Elle inclut notamment :
- Médicaments, dispositifs médicaux, armes, explosifs, drones ;
- Produits chimiques sensibles, tabac, cigarettes électroniques, alcool ;
- Vêtements usagés et produits périssables.
Les contrevenants s’exposent à des amendes de 5%, à la suspension de leur licence et à une radiation définitive en cas de fraude répétée.
Une politique économique à double objectif
Cette réforme va bien au-delà de la simple régularisation. Elle poursuit une double ambition :
- Réduire le commerce parallèle : jusqu’ici, une grande partie des importations de produits de consommation échappait à tout contrôle, privant l’État de recettes fiscales.
- Favoriser l’entrepreneuriat : les importateurs au cabas bénéficient désormais du statut d’auto-entrepreneur, avec affiliation à la Casnos et accès au système bancaire, leur offrant ainsi une reconnaissance sociale et économique.
Une pratique informelle en voie de formalisation
Avant cette réforme, des milliers de jeunes Algériens pratiquaient ce commerce pour compléter leurs revenus, finançant leurs voyages pour ramener vêtements, accessoires ou appareils électroniques destinés à la revente. Avec cette régularisation, le gouvernement espère mieux contrôler les flux financiers, sécuriser l’importation de biens de consommation et encourager ces acteurs à intégrer l’économie formelle.
Cette initiative s’inscrit dans une stratégie plus large de diversification économique et de soutien à la petite entreprise, tout en freinant les circuits parallèles qui dominaient une grande partie du commerce de détail.
Dispositif | Détails |
---|---|
Plafond financier | 1,8 million de dinars par déplacement (≈ 12 000 €) |
Fréquence | 2 opérations par mois maximum |
Douane et fiscalité | Droit fixe de 5% et régime fiscal spécifique |
Plateforme officielle | www.anae.dz |
Produits interdits | Médicaments, alcool, tabac, drones, vêtements usagés, etc. |
Sanctions | Amendes, suspension, radiation en cas de fraude |