La France a décidé de suspendre l’exemption du passeport diplomatique algérien, rompant avec un accord signé en 2013, dans un contexte de tensions croissantes entre Paris et Alger sur les questions migratoires, consulaires et diplomatiques.
Depuis plusieurs mois, les signaux de crispation entre la France et l’Algérie s’accumulent. La décision française de mettre fin à l’application de l’accord de 2013 sur l’exemption de visa pour les passeports diplomatiques s’inscrit dans une série de mesures plus fermes annoncées par Paris face à ce qu’elle considère comme un blocage de la coopération bilatérale.
Le président Emmanuel Macron a adressé une lettre à son Premier ministre, François Bayrou, dans laquelle il invoque le non-respect des obligations migratoires par Alger, la cessation de la coopération consulaire et le traitement réservé à deux ressortissants français détenus en Algérie. Cette décision marque un tournant diplomatique qui dépasse la seule question des visas.
Conséquences de la suspension du passeport diplomatique algérien par la France
L’accord signé en 2013 permettait aux titulaires de passeports diplomatiques et de service algériens d’entrer en France sans visa. Sa suspension par Paris s’accompagne d’un appel à activer le mécanisme « visa-réadmission » prévu par la loi immigration de 2024, qui autorise à restreindre l’octroi de visas de court et long séjour lorsque la coopération en matière de réadmission des ressortissants en situation irrégulière est jugée insuffisante.
Cette décision intervient après l’expulsion par Alger de fonctionnaires français et l’arrêt de la collaboration de ses 18 consulats en France avec les services de l’État. En mai dernier, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, avait déjà annoncé le renvoi en Algérie de détenteurs de passeports diplomatiques dépourvus de visa.

Riposte immédiate de l’Algérie et mesures de réciprocité
Dès le lendemain de l’annonce française, Alger a convoqué le chargé d’affaires français pour signifier la fin de l’accord de 2013, mais en allant plus loin : la mesure est définitive et concerne également les passeports diplomatiques et de service français. Les titulaires français devront désormais solliciter un visa pour entrer en Algérie.
Parallèlement, Alger a décidé de mettre un terme à la gratuité ou aux tarifs préférentiels accordés à l’ambassade de France pour l’occupation de biens immobiliers, incluant des terrains et résidences, affirmant qu’aucun avantage similaire n’est consenti à sa propre représentation diplomatique à Paris.
Un différend nourri par d’autres dossiers sensibles
La crise actuelle est alimentée par plusieurs différends récents. L’Algérie reproche à la France d’avoir reconnu la marocanité du Sahara occidental, un dossier hautement sensible pour Alger qui soutient le Front Polisario. De son côté, Paris évoque la détention en Algérie de l’écrivain Boualem Sansal et du journaliste Christophe Gleizes, condamnés respectivement à cinq et sept ans de prison, comme un point majeur de discorde.
Les autorités françaises dénoncent aussi l’absence de réponse d’Alger à leurs propositions de dialogue, estimant ne plus avoir d’autre choix que de durcir leur position.
Un climat de fermeté affichée mais des relations à rétablir
Si Emmanuel Macron a demandé à son gouvernement d’agir « sans repos et sans répit » face aux problèmes migratoires et sécuritaires liés aux ressortissants algériens en situation irrégulière, le chef de l’État affirme toujours viser le rétablissement de relations « équilibrées et justes » avec Alger.
François Bayrou, tout en confirmant l’application des mesures, insiste sur le fait que Paris ne souhaite pas s’enfermer dans un affrontement durable, laissant ouverte la possibilité d’un apaisement si les conditions de coopération sont réunies.