Ce jeudi, l’euro atteint son plus haut niveau depuis quatre an, il a franchi un seuil inédit depuis 2021 face au dollar américain, atteignant 1,1589 USD. Une hausse alimentée par l’incertitude géopolitique, les tensions au Moyen-Orient, et les spéculations sur la politique monétaire américaine. Voici ce que cela change.
Il y a des hausses qu’on remarque à peine, et d’autres qui en disent long. Ce jeudi, l’euro a franchi un cap symbolique face au dollar, atteignant son plus haut niveau depuis quatre ans. Un mouvement discret mais révélateur, dans un climat international où l’économie reste suspendue aux tensions politiques, aux décisions des banques centrales et à l’humeur des marchés. Derrière ce rebond de la monnaie européenne, il y a des signaux faibles, une certaine nervosité et peut-être un basculement.
L’euro atteint son plus haut niveau
L’euro a atteint son plus haut niveau en quatre ans face au dollar américain, porté par la prudence des investisseurs face aux tensions internationales. Les marchés ont réagi à une série de facteurs géopolitiques, notamment la déclaration de Donald Trump évoquant un possible transfert de diplomates américains hors du Moyen-Orient si la situation se dégrade.
À cela s’ajoutent les incertitudes commerciales liées aux relations entre Washington, Pékin et Téhéran, ce qui a boosté l’attractivité de l’euro comme valeur refuge relative, surtout en l’absence de nouvelles rassurantes du côté de la Réserve fédérale.
Un euro porté par la prudence américaine et le ralentissement de l’inflation
Du côté américain, les signaux envoyés par la politique intérieure et monétaire ont renforcé l’euro. Les investisseurs estiment peu probable une nouvelle hausse des taux d’intérêt par la Fed dans l’immédiat, notamment face à un ralentissement de l’inflation.
Alors que la Réserve fédérale américaine (Fed) maintient le cap de la prudence, les marchés semblent de plus en plus convaincus qu’une pause durable dans la hausse des taux est en cours. Les dernières données de l’indice des prix à la consommation (CPI), publiées début juin, montrent une inflation annuelle à 2,6 %, contre 9,1 % en juin 2022 un repli continu qui alimente la conviction que le cycle de resserrement monétaire touche à sa fin.
Face à ce contexte, le dollar a reculé sur les marchés internationaux, cédant du terrain au profit de l’euro. Le taux de change EUR/USD a progressé de 0,8 % en séance, atteignant 1,1589 dollar, soit son niveau le plus élevé depuis avril 2021. De son côté, l’indice DXY (Dollar Index), qui mesure la valeur du dollar face à un panier de six devises majeures, a reculé de 0,6 %, tombant à 104,7 points, contre 105,3 la veille.
Cette dynamique reflète un repositionnement des investisseurs, qui se tournent de nouveau vers la monnaie unique, perçue comme plus stable à court terme, dans un contexte où les tensions géopolitiques affaiblissent le billet vert.
Évolution récente des principaux indicateurs (en date du 13 juin 2025)
Indicateur | Valeur actuelle | Variation journalière | Plus haut depuis |
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Taux de change EUR/USD | 1,1589 USD | +0,8 % | Avril 2021 |
Indice du dollar (DXY) | 104,7 pts | -0,6 % | — |
Inflation (CPI USA – mai 2025) | 2,6 % (annuel) | -0,2 pt vs avril | Niveau stabilisé |
Taux directeur de la Fed | 5,25 % (inchangé) | Dernière hausse : mars | Mars 2024 |
Une hausse de l’euro qui pénalise les exportateurs… et avantage les importateurs
À court terme, l’appréciation de l’euro face au dollar a des conséquences économiques directes, en particulier pour les entreprises européennes tournées vers l’international. Une monnaie plus forte rend les produits européens plus chers à l’étranger, notamment sur les marchés libellés en dollars, ce qui peut réduire la compétitivité des exportateurs, en particulier dans les secteurs sensibles comme l’automobile, l’agroalimentaire ou les biens d’équipement.
À l’inverse, pour les ménages et les entreprises européennes, importer devient moins coûteux. Les matières premières, comme le pétrole, le gaz ou les métaux, souvent négociées en dollars, reviennent moins cher aux acheteurs européens lorsque l’euro s’apprécie. Cela contribue, indirectement, à freiner l’inflation importée, notamment sur l’énergie.
Pour les pays du Maghreb, notamment l’Algérie, la Tunisie et le Maroc, dont les échanges extérieurs sont en partie libellés en dollars, la dynamique euro/dollar n’est pas neutre.
- L’Algérie, dont les recettes en devises proviennent majoritairement des exportations de gaz et de pétrole en dollars, pourrait voir la valeur relative de ses avoirs diminuer lorsqu’ils sont convertis en euros (notamment pour les achats européens).
- Pour le Maroc ou la Tunisie, qui importent une grande partie de leurs produits de base (blé, carburants, biens manufacturés), une baisse du dollar peut alléger la facture énergétique et réduire le coût de certains biens de consommation, ce qui est crucial dans un contexte d’inflation encore sensible.
Par ailleurs, dans les pays où une partie de la dette extérieure est libellée en dollars, comme la Tunisie, une baisse du billet vert peut soulager le service de la dette, car les remboursements coûtent mécaniquement moins en monnaie locale.
Quelles conséquences pour les échanges et les consommateurs ?
Pour les pays de la zone euro, cette appréciation est à double tranchant. D’un côté, elle rend les importations moins chères, une bonne nouvelle pour les consommateurs européens, notamment sur les matières premières et l’énergie. Mais à l’inverse, les exportateurs européens risquent de souffrir, car leurs produits deviennent mécaniquement plus chers à l’international. Cela pourrait peser à court terme sur la balance commerciale de certaines économies comme l’Allemagne, très exposée aux exportations industrielles.
La remontée de l’euro intervient dans un climat chargé d’incertitudes diplomatiques, économiques et monétaires. Si la tendance se confirme, elle pourrait redistribuer certaines cartes, notamment dans les relations commerciales transatlantiques. Mais tout dépendra des décisions à venir des banques centrales et de l’évolution des tensions au Moyen-Orient.