Face à une pénurie de main-d’œuvre sans précédent, Rome fait volte-face. Le gouvernement italien, pourtant classé à droite, a décidé d’accueillir 500 000 travailleurs non européens d’ici 2028. Une décision à la fois pragmatique et déroutante, dans un pays où la question migratoire reste hautement inflammable.
On le disait fermé, il s’ouvre. L’Italie manque de bras, de jeunes, de souffle. Et pour la première fois depuis longtemps, le gouvernement a décidé de regarder la réalité en face, sans travailleurs étrangers, le pays s’enlise.
Alors, oui, c’est paradoxal. Ce même pouvoir politique, qui promettait encore hier de “freiner l’immigration”, prépare aujourd’hui le plus grand plan de recrutement étranger de ces vingt dernières années. Entre 2026 et 2028, un demi-million de permis de travail seront délivrés. Une décision aussi pragmatique que contradictoire, dictée par une réalité économique impossible à ignorer, sans main-d’œuvre étrangère, le pays s’essouffle.
Une pénurie criante dans tous les secteurs
Sur les chantiers, dans les hôtels ou les exploitations agricoles, la situation devient intenable. Les entreprises italiennes peinent à recruter. Arben Mece, géomètre pour la société Novalux Construction, résume le problème sans détour : « Nous travaillons sur trois chantiers en même temps. Il n’y a tout simplement pas assez de travailleurs pour tout finir. »
Même son de cloche dans le tourisme. « À Rome, il y a des milliers d’hôtels. Tout le monde cherche désespérément du personnel », explique Gaetano Lauro, directeur du “Inn at the Roman Forum”.
La démographie italienne joue contre le pays. La population vieillit, les jeunes partent à l’étranger, et les secteurs clés, construction, hôtellerie, agriculture, se retrouvent en manque chronique de main-d’œuvre.
Le “Decreto Flussi”, un outil de survie économique
Le plan du gouvernement, baptisé Decreto Flussi, n’est pas nouveau. Il fixe chaque année le nombre de travailleurs étrangers autorisés à venir en Italie. Mais cette fois, l’ampleur est inédite. Entre 2026 et 2028, 500 000 nouveaux permis seront délivrés, soit une augmentation tres importante avec comme objectif régulariser l’emploi informel et stabiliser des secteurs entiers qui fonctionnent, souvent, grâce à une main-d’œuvre étrangère non déclarée.
Pour être honnête, la mesure sonne comme un aveu d’échec. Pendant des années, la droite italienne a promis de freiner les arrivées. Aujourd’hui, elle les organise. Parce qu’il faut bien faire tourner les chantiers, les hôtels et les fermes.
Entre régularisation et réalité du terrain
Le paradoxe, c’est que les travailleurs étrangers sont déjà là. Depuis longtemps. Ils construisent, récoltent, servent, nettoient mais souvent sans papiers.« Beaucoup de travailleurs arrivés légalement via le Decreto Flussi se retrouvent ensuite sans contrat. Ils deviennent irréguliers malgré eux », explique Alessandra Valentini du syndicat agricole FLAI.
Le nouveau plan veut officialiser ce qui existe déjà. En clair, redonner un cadre légal à une situation que tout le monde connaît. Et surtout, permettre aux entreprises et a l’économie Italienne de respirer un peu.
Une ouverture sous pression
Les syndicats et le patronat poussaient depuis des mois et derrière les discours, le ton change. Les entreprises ont mis la pression. Et Rome a fini par céder. Le gouvernement parle de “réalisme économique”. Les syndicats, eux, de “victoire sociale”. Entre les deux, une vérité toute simple, sans les travailleurs étrangers, l’Italie ne tourne plus.
Et ce n’est pas tout. Car ce plan n’est qu’un début. Dans les coulisses, plusieurs régions demandent déjà d’élargir les quotas. l’Italie a besoin du monde pour continuer à vivre.
Les syndicats et le patronat poussaient depuis des mois. Le gouvernement a fini par céder, sous la pression économique. Derrière la façade politique, le message est que sans les travailleurs étrangers, l’Italie ne peut plus avancer.
Le pari est risqué politiquement, mais nécessaire économiquement. Les entreprises l’ont bien compris. Et même les plus sceptiques au sein du gouvernement admettent, à voix basse, qu’il n’y avait plus le choix.






