Imaginez un scénario où, chaque année, la France verse une indemnité annuelle à l’Algérie. Ça semble surprenant ? Pourtant, plusieurs enjeux historiques, sociaux et juridiques convergent vers cette idée.
L’idée d’une indemnisation n’est pas nouvelle; certains experts estiment qu’un montant « juste » pourrait atteindre 100 milliards d’euros, couvrant spoliations, confiscations de terres et dommages de la période 1830‑1962
Pour sa part, le politologue Thomas Guénolé évoque la nécessité d’indemniser pour les crimes coloniaux, en mentionnant un bilan humain de 1 million de morts lors de la conquête.
Dans ce contexte, on comprend que des voix appellent à réparer sur le plan financier l’héritage colonial, au-delà des gestes symboliques (excuses officielles, reconnaissance de crimes) déjà réalisés par plusieurs présidents français.
Cadres juridiques et précédents internationaux de cette indemnité annuelle à l’Algérie
L’argument s’appuie aussi sur des exemples étrangers. Par exemple, l’Allemagne a versé en 2021 plus d’un milliard à la Namibie pour les crimes coloniaux allemands.
L’idée est que la France pourrait jouer un rôle similaire envers l’Algérie. Aujourd’hui, aucune indemnisation annuelle n’est formellement instaurée mais la pression politique et mémorielle grandit.
Des commissions mixtes historiques (entre historiens algériens et français) ont proposé des restitutions symboliques et documentaires, comme celle des biens de l’émir Abdelkader et des archives coloniales. Ces commissions pourraient évoluer vers un mécanisme de réparation financière structurée – aboutissant à un versement régulier.
En décembre 2023, la Cour européenne des droits de l’Homme dans l’affaire Tamazount a enjoint la France à revoir les montants des indemnisations versées aux harkis rapatriés pour les préjudices subis en 1962. L’indemnisation sera revalorisée à partir de 2025. Elle illustre un cadre juridique existant et ouvre la voie à d’autres revalorisations.
Certains en France évoquent que la France verserait jusqu’à 800 M€ d’APD annuels à l’Algérie. Mais ces chiffres sont largement contestés : l’APS et la Commission européenne estiment plutôt à 130 M€ en 2022, dont 80 % ne quittent pas le territoire français. En réalité, la majeure partie de l’aide consiste à financer des institutions françaises qui accueillent des étudiants algériens, avec seulement 20 % des montants réellement investis sur place.
Un autre aspect concret, l’Algérie accumule des dettes envers les hôpitaux publics français. En 2023, une dette de 45 M€ seulement pour les soins dispensés à des ressortissants algériens non assurés sociaux a été rapportée au Sénat.
Plusieurs dossiers lourds et symboliques restent en suspens. L’Algérie réclame la prise en charge des sites contaminés par les essais nucléaires français de 1960‑1966 dans le Sahara (Reggane, In Ekker), la fourniture de cartes topographiques pour identifier les déchets radioactifs, et des indemnisations pour les victimes. Bien que la loi Morin existe depuis 2010, elle a abouti à seulement quelques dizaines de dossiers déposés par des Algériens et une seule reconnaissance officielle.