À la suite des recommandations de la Cour des comptes, la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) affirme avoir renforcé ses dispositifs de contrôle,des retraites versées à l’étranger, notamment la retraite France pour les Algériens, Parmi les principales évolutions, l’usage de la biométrie et la présence d’agents dédiés au consulat de France à Alger.
Le rapport annuel de la Cour des comptes, publié ce lundi 26 mai, dresse un constat sévère : les comptes sociaux français sont « hors de contrôle », avec un déficit global de 15,3 milliards d’euros en 2024. Si la branche maladie concentre la majeure partie de ce déséquilibre, la gestion des retraites à l’étranger, notamment celle des Algériens, qui n’échappe pas à l’attention des institutions. Suspicions de fraude, vérifications biométriques, contrôles in situ… La CNAV, sous pression, détaille ses nouvelles pratiques.
La retraite France pour les Algériens sous surveillance
Chaque année, plusieurs milliards d’euros sont versés au titre des retraites françaises à des bénéficiaires résidant hors du territoire, notamment dans des pays avec une forte présence d’anciens travailleurs immigrés, comme l’Algérie.
Selon la Cour des comptes, les suspicions de fraude sur ces pensions étrangères pourraient atteindre 100 millions d’euros par an. Un chiffre contesté par le directeur général de la CNAV, Renaud Villard, qui avance plutôt une fourchette comprise entre 50 et 60 millions d’euros. Si ces montants restent modestes au regard du déficit global de la Sécurité sociale, ils alimentent une défiance croissante sur la fiabilité du système. Et appellent des réponses concrètes.

Biométrie, une nouvelle étape dans le contrôle des retraités à l’étranger
Face aux recommandations de la Cour des comptes, la CNAV assure avoir anticipé certaines mesures. C’est notamment le cas de la biométrie, utilisée depuis septembre 2024 pour authentifier les retraités résidant hors de France.
Le principe, demander aux pensionnés de se filmer avec leur smartphone pour vérifier, à travers un algorithme de reconnaissance faciale, qu’ils sont bien vivants et titulaires légitimes de leur pension. Ce procédé, s’il marque une avancée technologique, n’est pas sans difficulté. « C’est parfois un petit choc pour un retraité de 85 ans », reconnaît Renaud Villard, qui insiste toutefois sur l’importance de la pédagogie dans l’accompagnement de ces nouveaux outils. Depuis 2024, les retraités français résidant à l’étranger doivent prouver leur existence via :
- Une preuve de vie biométrique (application smartphone)
- Ou une convocation consulaire en cas de doute
L’Algérie reste le premier pays de résidence des retraités nés à l’étranger percevant une pension français
Contrôles renforcés au consulat de France à Alger
Outre la biométrie, la CNAV affirme avoir renforcé sa présence sur le terrain. Deux agents sont désormais basés en permanence au consulat de France à Alger, en charge de convoquer les retraités à des entretiens de vérification.
L’objectif, s’assurer de l’identité et de l’existence réelle des bénéficiaires, en particulier ceux pour lesquels des doutes persistent. D’après la CNAV, ce dispositif a déjà permis de supprimer plusieurs centaines de dossiers suspects.
Ces contrôles ciblés interviennent dans un climat tendu entre volonté d’assainir le système et sensibilité diplomatique, les liens entre la France et l’Algérie autour des retraites étant à la fois anciens et complexes.
Une contribution marginale à la réduction du déficit
Renaud Villard le reconnaît lui-même, ces mesures ne reboucheront pas le « trou » de la Sécurité sociale. La fraude détectée, bien qu’indéniable, reste marginale au regard de l’ensemble des dépenses publiques. Mais pour le directeur de la CNAV, l’enjeu est ailleurs : « Le symbole est très important, surtout à l’heure où l’on demande des efforts à tous. Face à cela, on doit être intraitables avec ceux qui essaient de frauder. »
La volonté de renforcer la confiance dans le système prévaut donc sur les gains financiers à court terme. En d’autres termes : montrer que l’État contrôle, même lorsqu’il s’agit de pensions versées à plusieurs milliers de kilomètres.
Vers une généralisation du contrôle biométrique dans d’autres pays ?
La CNAV laisse entendre que le modèle algérien pourrait s’étendre à d’autres pays à forte densité de retraités d’origine étrangère. Le développement de solutions numériques, couplé à une présence physique locale dans certains consulats, constitue un axe stratégique de modernisation du suivi des retraites exportées.
L’enjeu à venir ? Parvenir à un équilibre entre exigence de transparence et respect de la dignité des retraités, souvent âgés, parfois éloignés des usages numériques. Un défi que la CNAV dit vouloir relever avec prudence, mais fermeté.
La gestion des retraites françaises à l’étranger, et en particulier en Algérie, est désormais au cœur des préoccupations institutionnelles. Si la CNAV affirme avoir pris les devants en matière de contrôle, les attentes restent fortes, tant du côté de la Cour des comptes que de l’opinion publique.
La retraite France pour les Algériens devient, au-delà de son aspect technique, un sujet hautement symbolique dans le débat sur l’équité, la transparence et l’efficacité des politiques sociales. Entre contrôle numérique et présence consulaire, c’est une nouvelle page de la relation franco-algérienne qui se joue, loin des projecteurs, dans les arcanes de l’administration.