L’UE prépare une nouvelle stratégie pour simplifier l’obtention du visa Schengen et attirer les travailleurs qualifiés étrangers. Avec 9,7 millions de visas délivrés en 2024, l’Europe repense sa politique migratoire. L’Union veut séduire talents étrangers et start-up tout en simplifiant les démarches.
L’Union européenne s’apprête à tourner une nouvelle page dans sa politique migratoire. Face aux lourdeurs administratives et à la compétition mondiale pour attirer les talents, Bruxelles prépare une stratégie repensée pour les visas Schengen. L’objectif est clair : ouvrir davantage ses portes aux travailleurs qualifiés, chercheurs et entrepreneurs étrangers, tout en fluidifiant l’accès aux étudiants et aux séjours d’affaires. Une réforme qui pourrait redessiner l’équilibre des flux migratoires vers l’Europe, et offrir de nouvelles perspectives à des pays comme l’Algérie.
Une politique des visas au cœur des priorités européennes
En 2024, l’Union européenne a délivré 9,7 millions de visas Schengen, tandis que 1,4 milliard de personnes de 61 pays bénéficiaient déjà d’un accès sans visa pour les courts séjours. Malgré ces chiffres impressionnants, les procédures demeurent un casse-tête pour nombre de demandeurs.
Selon la Commission européenne, la complexité des démarches, vérification des documents, délais d’attente interminables, manque de rendez-vous disponibles, constitue un frein majeur à l’immigration légale. Les mêmes obstacles touchent aussi bien les visas de court séjour que les permis de résidence longue durée.
Attirer les talents, combler les pénuries de main-d’œuvre
La réforme vise en priorité les profils hautement qualifiés. L’Europe souhaite renforcer l’usage de la carte bleue européenne, faciliter l’accueil des chercheurs et étudiants étrangers, et ouvrir la voie aux entrepreneurs innovants.
La Commission européenne prépare une stratégie complète des visas (« Blue Carpet ») pour attirer des travailleurs étrangers hautement qualifiés, étudiants, chercheurs et entrepreneurs, en réponse à la consultation publique lancée cet été 2025. Objectif, simplifier les procédures de visas long séjour, accélérer la délivrance et fluidifier les démarches pour les migrants qualifiés
La directive Carte Bleue européenne sera réformée, seuils salariaux plus flexibles (jusqu’à 1,6× le salaire national ou 80 % pour les professions en pénurie), mobilité intra-UE après 12 à 18 mois, permis unique (« Single Permit ») simplifié. L’ensemble du paquet devrait être finalisé et publié au 4ᵉ trimestre 2025, après consultation des parties prenantes.
L’UE prévoit aussi la création d’une plateforme numérique unique (EU VAP) pour centraliser les demandes de visa Schengen (phase de déploiement prévue entre 2026 et 2031)
- Simplifier les démarches en ligne et réduire les délais de traitement.
- Créer des passerelles spécifiques pour les travailleurs des secteurs en tension (santé, ingénierie, numérique).
- Encourager la mobilité intra-européenne des talents déjà installés dans un État membre.
Ce virage stratégique s’inscrit dans un contexte de vieillissement démographique et de pénuries chroniques de main-d’œuvre dans plusieurs pays de l’UE, de l’Allemagne à l’Italie en passant par l’Espagne.
Une ouverture ciblée, mais un contrôle renforcé
Si Bruxelles veut séduire les talents étrangers, elle ne néglige pas la dimension sécuritaire. La Commission souligne que la stratégie doit aussi protéger les intérêts géopolitiques de l’Europe. Cela inclut, une meilleure coopération avec les pays tiers sur la gestion des frontières et de la sécurité, un contrôle accru contre la fraude documentaire et le trafic de visas. mais aussi une harmonisation des exemptions de visas appliquées par les États membres. Autrement dit, il s’agit d’une ouverture maîtrisée, où les circuits légaux seront facilités, mais où les voies irrégulières resteront fermement verrouillées.
Dans un contexte international marqué par la concurrence des États-Unis, du Canada ou encore des pays du Golfe pour capter les talents, l’Europe ne veut plus rester en retrait.
La réforme des visas est pensée comme un instrument stratégique pour renforcer son attractivité, tout en consolidant son rôle de pôle d’innovation et de recherche. Elle reflète aussi une volonté politique, utiliser la politique migratoire comme un levier diplomatique, en renforçant les partenariats avec des pays tiers, notamment en Afrique du Nord.
Quelles perspectives pour les pays comme l’Algérie ?
Pour l’Algérie et d’autres voisins du sud de la Méditerranée, cette réforme pourrait ouvrir de nouvelles opportunités. Les étudiants et chercheurs algériens, souvent freinés par les lenteurs consulaires, pourraient bénéficier de procédures simplifiées.
De même, les travailleurs qualifiés dans les secteurs en pénurie, médecine, ingénierie, BTP, pourraient trouver un accès plus fluide au marché européen. Néanmoins, la stratégie européenne vise d’abord à attirer les profils les plus compétitifs, laissant en suspens la question des jeunes peu qualifiés ou en quête de mobilité sociale.
Avec sa nouvelle stratégie de visas Schengen, l’Europe cherche à trouver l’équilibre entre ouverture et sécurité. Bruxelles veut simplifier les démarches, attirer les talents et renforcer ses relations avec les pays partenaires, tout en gardant un contrôle strict sur les flux. Si cette réforme est mise en œuvre d’ici fin 2025, elle pourrait changer la donne pour des milliers de candidats à la mobilité, en particulier en Afrique du Nord.