Amel Bent, chanteuse emblématique de la scène française, vient d’obtenir la nationalité algérienne. Une démarche symbolique pour l’artiste née d’un père algérien et d’une mère marocaine. À travers ce geste fort, la chanteuse renoue avec ses origines et affirme son attachement à une double identité assumée et revendiquée.
C’est dans une salle du consulat d’Algérie à Nanterre qu’Amel Bent a officialisé ce qui, pour elle, allait bien au-delà d’un simple document. Devant un public ému et sous l’œil des caméras, la chanteuse a annoncé avoir reçu la nationalité algérienne. Une déclaration simple, mais lourde de sens : « Je suis Algérienne officiellement depuis quelques mois », a-t-elle affirmé.
Le chemin vers cette reconnaissance n’a pas été immédiat. Il a fallu du temps, de l’introspection, et une volonté de réconcilier les morceaux d’une identité longtemps fractionnée. Derrière ce geste se dessine un parcours personnel marqué par l’absence d’un père, la quête de repères et un besoin de transmission.
Amel Bent une double appartenance enfin officialisée
Amel Bent trouve ici tout son sens. Née en 1985 à Paris, d’un père algérien et d’une mère marocaine, elle a grandi à La Courneuve dans la célèbre cité des 4000. Pendant des années, elle a incarné la diversité culturelle française sans pour autant disposer du passeport algérien. C’est désormais chose faite.
Pour l’interprète de « Ma Philosophie », cette officialisation représente bien plus qu’un acte administratif. Elle incarne un choix intime, une volonté de mettre en lumière ses racines paternelles longtemps gardées en silence. « Ce ne sont pas les papiers qui font l’amour ni la fierté, mais aujourd’hui, je suis fière d’avoir mes papiers », a-t-elle confié, les yeux brillants, sur l’estrade du consulat.
Un long chemin de réconciliation identitaire
Le lien avec son père, longtemps rompu, a aussi pesé dans cette démarche. Dans sa chanson « Merci Monsieur », Amel Bent aborde la complexité de cette relation. L’éloignement, les retrouvailles tardives, les silences pleins de regrets, autant d’étapes dans une reconstruction personnelle profonde. Devenir mère à son tour, et vivre au quotidien la parentalité avec Patrick Antonelli, a ravivé cette nécessité d’explorer ses origines et de les accepter pleinement.
Elle avait déjà confié dans une interview à « Télé 7 Jours » combien ce travail de maturité avait changé son regard sur la paternité. Revivre certaines scènes à travers les yeux de ses enfants lui a permis de comprendre, sans nécessairement justifier, les silences de son propre père. Cette évolution intérieure a, sans doute, pavé la voie à sa démarche actuelle.
Racines maghrébines et obstacles à la reconnaissance
Le parcours artistique d’Amel Bent a été marqué par des succès retentissants, mais aussi par des tensions liées à son origine. En accédant au fauteuil de coach dans « The Voice », elle a dû faire face à des propos ouvertement racistes : « On m’a dit : va faire The Voice à Alger », a-t-elle révélé dans un entretien avec Manu Katché. Ces attaques, souvent violentes, l’ont même conduite à quitter les réseaux sociaux pour se protéger.
Ces expériences illustrent la difficulté, encore persistante, d’être pleinement accepté dans l’espace public français lorsqu’on porte un nom à consonance maghrébine. Pourtant, elle a toujours affirmé sa double culture, sans renier aucune de ses origines. Elle évoque souvent l’éducation qu’elle transmet à ses enfants, enracinée dans un islam « très modéré, avec chacun son degré de foi et de pratique ».

L’Algérie comme horizon artistique possible
Si la chanteuse n’a pas encore annoncé de concert en Algérie, cette nouvelle citoyenneté pourrait bien ouvrir des perspectives inattendues. Son huitième album « Minuit une » est prévu pour mai 2025, suivi d’un concert à l’Accor Arena en avril 2026. Une tournée incluant Alger, Oran ou Constantine ne serait plus qu’une question de temps. D’autant que certains de ses clips récents, tournés à Oran, rendent hommage à la mémoire familiale, à la transmission intergénérationnelle, et à la force des femmes du Maghreb.
Le public algérien, déjà sensible à sa voix et à son parcours, pourrait accueillir cette nouvelle étape avec enthousiasme. Dans un contexte politique tendu, où les relations franco-algériennes se trouvent parfois instrumentalisées, l’initiative d’Amel Bent résonne autrement : comme une réponse humaine et sincère aux discours identitaires figés.
Aujourd’hui, Amel Bent se dit chez elle des deux côtés de la Méditerranée. Un passeport en main, mais surtout une paix retrouvée avec son histoire. Un équilibre personnel et symbolique qui en dit long sur les trajectoires complexes des enfants de l’immigration, tiraillés entre injonctions et appartenances. Et qui, parfois, trouvent enfin leur place sans avoir à choisir.