Les règles concernant les billets d’avion en Algérie évoluent. Les compagnies aériennes étrangères devront facturer certains trajets long-courriers en devise, et non plus en dinars. Ce changement imposé par la Banque d’Algérie vise à stopper les pratiques frauduleuses. Voici ce que cela signifie pour les agences de voyages et les passagers.
Le marché des billets d’avion en Algérie s’apprête à vivre un nouveau règlement . À partir de maintenant, plusieurs compagnies étrangères opérant sur le sol algérien devront appliquer une règle longtemps négligée, certains vols devront être facturés en devise, et non plus en dinars. Cette mesure, imposée par la Banque d’Algérie et renforcée par le nouveau système numérique des douanes, vise à mettre fin à des transferts illicites de fonds réalisés sous couvert de billets vendus localement. Pour les agences de voyage et les voyageurs concernés, il s’agit d’un changement majeur, à la fois technique, juridique et économique.
Billets d’avion en Algérie, paiement en devise pour les compagnies étrangères
Longtemps tolérée, la pratique qui permettait à certaines compagnies étrangères opérant en Algérie de vendre leurs billets d’avion en dinars algériens sur des lignes long-courriers est désormais dans le viseur des autorités. Le règlement de la Banque d’Algérie est pourtant clair, les titres de transport internationaux doivent être vendus en devise dès lors qu’ils ne sont pas exploités par Air Algérie ou qu’ils comprennent une ou plusieurs escales. Jusqu’ici, cette règle était souvent ignorée ou contournée par des agences de voyage partenaires, entraînant des pertes considérables pour le Trésor public.
Ce que dit précisément la Banque d’Algérie
Le texte de la Banque d’Algérie impose une règle simple, si le prix d’un billet avec escale dépasse de plus de 10 % celui d’un vol direct équivalent, la différence doit être payée en devise convertible. En clair, au-delà de cette marge de tolérance, le paiement en dinars devient illégal. Les billets concernés doivent donc faire l’objet d’un règlement en euro, dollar ou autre devise convertible, comme le prévoient les règles d’émission fixées par la BA. Jusqu’ici, cette obligation restait théorique, faute de moyens techniques pour la faire respecter. Ce n’est plus le cas.

Un système douanier numérique pour stopper les fraudes
C’est le lancement du système Alces, plateforme numérique développée par la douane algérienne, qui marque une véritable rupture. Ce nouvel outil permet de surveiller en temps réel les opérations de vente de billets, de croiser les données déclarées par les compagnies et agences, et de détecter les écarts frauduleux. Plusieurs agences de voyage ont d’ailleurs reçu des correspondances urgentes les appelant à respecter la réglementation sous peine de sanctions, selon des sources relayées par la presse locale.
Une compagnie étrangère, non nommée mais très active sur le territoire, a même détaillé, dans une note interne consultée par Echourouk, les nouvelles procédures de vente à appliquer immédiatement. Cette réaction rapide montre que le message de la douane est pris au sérieux.
Un enjeu fiscal pour l’État algérien
Pourquoi une telle fermeté ? La réponse est économique. En vendant des billets en dinar algérien, puis en transférant le montant en devise à l’étranger via leurs maisons mères, certaines compagnies ont contourné le système fiscal algérien pendant des années. En parallèle, des fausses déclarations de chiffre d’affaires ont permis de réduire encore les contributions dues à l’État. Résultat : des millions d’euros ont échappé au Trésor public.
Avec la numérisation des procédures douanières, le gouvernement entend reprendre le contrôle sur ces flux, mettre fin aux transferts illégaux, et forcer la transparence des compagnies étrangères. L’entrée en vigueur du système Alces apparaît ainsi comme un signal fort de souveraineté économique.
Ce que doivent faire les agences de voyage
Les agences de voyage agréées sont désormais directement concernées par la mise en œuvre de cette mesure. Elles devront :
- Vérifier si la ligne vendue est soumise au paiement en devise
- Respecter la règle des 10 % de marge maximale sur les billets avec escale
- Exiger un règlement en devise au-delà de ce seuil
- Déclarer avec précision chaque transaction au système de douane Alces. Ignorer ces obligations pourrait exposer les agences à des sanctions administratives et financières. La prudence est donc de mise.
Redéfinition des rapports entre l’Algérie et les compagnies étrangères
Avec cette réforme, l’Algérie affirme sa volonté de reprendre le contrôle sur son ciel… et sur ses flux financiers. L’obligation pour les compagnies étrangères de facturer en devise certains billets d’avion marque une rupture avec des pratiques longtemps tolérées, voire institutionnalisées. En encadrant mieux les ventes de titres de transport, l’État algérien ne vise pas uniquement la conformité réglementaire, il cherche à protéger son économie nationale, à endiguer l’évasion de devises, et à rétablir un rapport d’équité entre opérateurs locaux et internationaux.
Pour les passagers algériens, ce changement pourrait se traduire, à court terme, par une légère hausse des prix sur certaines destinations long-courriers. Mais sur le long terme, cela pourrait aussi signifier plus de transparence dans la fixation des tarifs, moins de marges opaques, et une concurrence plus saine entre compagnies.
Quant aux transporteurs étrangers, ils devront désormais s’adapter à un cadre plus strict, basé sur la traçabilité numérique, le respect des seuils autorisés, et la déclaration complète des ventes. Autrement dit, la porte du marché algérien reste ouverte, mais elle s’accompagne de conditions claires. Et cette nouvelle posture pourrait bien servir d’exemple à d’autres secteurs économiques sensibles.