L’Algérie criminalise le Bitcoin à travers une nouvelle loi entrée en vigueur en juillet 2025. L’ensemble des activités liées aux cryptomonnaies est désormais interdit, y compris leur détention, leur promotion et leur minage. Les contrevenants s’exposent à des peines de prison et à de lourdes amendes selon la législation en vigueur.
L’évolution était pressentie, elle est désormais officielle. La promulgation de la loi nᵒ 25-10 redéfinit complètement le cadre légal autour des actifs numériques en Algérie. Longtemps cantonnée à une interdiction de fait, la politique nationale vis-à-vis des cryptomonnaies prend un tournant radical avec l’inscription claire de leur interdiction dans le corpus juridique algérien.
Concrètement, l’ensemble des usages du Bitcoin, mais aussi d’autres monnaies virtuelles comme l’USDT (Tether) ou l’Ethereum, est désormais considéré comme un délit. Qu’il s’agisse de miner, d’échanger, de détenir ou simplement de promouvoir une cryptomonnaie, la loi rend ces activités illégales et passibles de prison ou d’amendes lourdes.
L’Algérie criminalise le Bitcoin à travers un texte de loi inédit
La loi 25-10, publiée au Journal Officiel le 24 juillet 2025, marque une rupture. Pour la première fois, un cadre légal explicite interdit toute opération liée aux crypto-actifs. L’article 6 bis de cette loi stipule l’interdiction formelle d’émettre, d’acheter, de vendre, d’utiliser, de détenir ou de promouvoir des actifs numériques. Cela inclut également le minage, l’exploitation de portefeuilles numériques et les plateformes d’échange.
Cette interdiction couvre tous les usages, que ces actifs soient considérés comme instruments d’investissement ou comme moyens de paiement. En d’autres termes, ni les plateformes comme Binance, ni les wallets de type Metamask, ni les paiements en Bitcoin n’ont leur place dans le cadre légal algérien. Toute activité dans ce champ est assimilée à une infraction relevant du domaine pénal.
Sanctions renforcées pour toute infraction aux règles sur les cryptomonnaies
L’article 31 bis prévoit des peines allant de deux mois à un an de prison, assorties d’une amende comprise entre 200 000 et 1 000 000 de dinars. La loi prévoit aussi que ces peines peuvent être cumulées, en fonction de la gravité des infractions constatées.
Cette démarche n’est pas simplement répressive ; elle répond à une stratégie plus large de sécurisation de l’environnement financier national. Les cryptomonnaies sont perçues comme un vecteur d’instabilité, de fuite de capitaux et un outil potentiel de blanchiment d’argent, en particulier dans des régions sensibles comme le Sud algérien où le minage non encadré progresse.
Un dispositif légal aligné sur les standards internationaux
Ce durcissement du cadre réglementaire vise à se conformer aux normes du Groupe d’action financière (GAFI), qui recommande un encadrement strict des monnaies numériques pour prévenir leur usage dans des circuits illégaux. L’Algérie renforce ainsi les fondations de sa loi n° 05-01 sur le blanchiment d’argent, en intégrant les crypto-actifs dans la catégorie des « biens ou fonds » susceptibles de servir à des fins criminelles.
Il s’agit aussi de mettre fin à un vide juridique : jusqu’ici, malgré une interdiction évoquée dans la loi de finances de 2018, les cryptomonnaies étaient souvent utilisées dans une zone grise, entre interdiction informelle et tolérance de fait. Cette nouvelle législation met fin à cette ambiguïté.
Un marché parallèle numérique difficile à démanteler
Malgré le cadre légal désormais limpide, l’usage informel des cryptos n’a jamais totalement disparu. Des groupes Telegram ou Facebook continuent de proposer des échanges, des conseils ou du minage domestique à petite échelle. Certains utilisateurs, notamment les jeunes ou les expatriés, utilisent encore des cartes crypto-débitées à l’étranger pour convertir des monnaies numériques en dinars algériens.
Des témoignages de mineurs de provinces comme Batna ou Adrar révèlent que le minage artisanal reste marginal mais actif, avec des gains limités, souvent quelques centimes par jour. Cette pratique illustre la persistance de la crypto dans les marges économiques et numériques du pays, même si elle est désormais passible de poursuites.
Un positionnement national très éloigné des tendances mondiales
Tandis que plusieurs États développent des régulations progressives, comme la Corée du Sud ou le Nigéria, ou qu’ils expérimentent des monnaies numériques de banque centrale (MNBC), l’Algérie choisit l’option de la fermeture totale. Ce choix s’inscrit dans une tendance plus restrictive observée dans d’autres pays du monde arabe comme l’Égypte ou le Maroc, ou encore au Pakistan et au Népal.
Contrairement à l’Europe où l’encadrement des cryptos se fait par des mécanismes de régulation, d’enregistrement ou de taxation, l’Algérie se démarque par une logique d’exclusion, considérant que l’espace crypto ne peut pas coexister avec le système monétaire officiel.
La porte reste pour l’instant fermée à toute forme de régulation ou d’intégration des cryptomonnaies dans le paysage financier national. Mais cette approche rigide pourrait être amenée à évoluer, notamment si des formes plus encadrées d’actifs numériques, comme les stablecoins régulés ou les projets d’identité numérique, venaient à émerger sous des formats compatibles avec les exigences de traçabilité et de sécurité du système bancaire algérien.