Alors que l’euro atteint un nouveau record face au dinar algérien, dépassant les 260 dinars sur le marché parallèle, l’écart avec le taux officiel s’élargit fortement. Cette divergence met en lumière des déséquilibres structurels persistants dans le système de change, impactant aussi bien les opérateurs économiques que les particuliers.
Sur les places informelles de change, l’euro a franchi un seuil symbolique en atteignant 262 dinars à la vente, un niveau jamais observé auparavant. Ce nouveau pic coïncide avec une stabilité relative du taux officiel, toujours autour de 150,13 dinars. Cet écart de plus de 110 dinars entre les deux cotations reflète une divergence croissante entre l’offre institutionnelle et les flux non régulés.
Le dinar algérien continue ainsi de s’éroder face aux grandes devises, alimenté par une combinaison de facteurs structurels et conjoncturels. Le marché parallèle reste un indicateur clé de cette réalité, souvent en décalage avec les taux affichés par la Banque d’Algérie. Au square Port-Saïd, centre névralgique des opérations informelles, les devises s’échangent à des valeurs qui s’éloignent nettement de la cotation officielle.
L’euro atteint un nouveau record créant des écarts notables
Au cœur de cette flambée, l’euro s’échange à 262 DZD à la vente et 258 DZD à l’achat dans le circuit parallèle, contre 150,13 DZD sur le marché interbancaire officiel. L’écart dépasse désormais 74 %, un niveau rarement atteint. Ce différentiel est significatif en termes de pouvoir d’achat et de dynamique de change, notamment pour les opérateurs économiques, les voyageurs et les importateurs.
La hausse de la monnaie européenne sur le marché informel n’est pas isolée. Le dollar américain, deuxième devise la plus échangée, se maintient autour de 237 DZD à la vente et 235 DZD à l’achat, contre 132,56 DZD selon la cotation officielle. La livre sterling enregistre également un écart notable, avec un taux parallèle de 301 DZD à la vente, bien au-dessus des 176,53 DZD du marché régulé. Ces écarts, bien qu’inhérents à un système de double taux de change, révèlent les déséquilibres persistants dans l’accès aux devises.

Dinar sous pression face aux principales devises
Les variations actuelles s’inscrivent dans une logique technique propre aux systèmes à double marché. Dans un contexte de contrôle des changes strict, le marché informel absorbe une partie importante de la demande, notamment celle des segments non couverts par le marché officiel. Cette demande s’intensifie notamment en période de forte activité touristique, d’importation informelle ou de mobilité internationale.
D’autres devises affichent, elles aussi, des différentiels élevés. Le franc suisse (CHF) se négocie à 279 DZD à la vente dans les circuits parallèles, contre 160,43 DZD au taux officiel. Le dollar canadien (CAD) se situe à 162 DZD (vente) et, 158 DZD (achat), contre 95,98 DZD sur les marchés officiels. La livre sterling, quant à elle, maintient son statut de devise forte avec un taux parallèle atteignant 301 DZD.
Ces écarts traduisent une prime de risque implicite sur le marché informel, qui répercute des facteurs comme la rareté de la devise à l’approche du Hadj et des vacances d’été. L’allocation touristique de 750 euros (par adulte et par an) prévue par le ministère des Finances pour la mi-avril, tarde à rentrer officiellement en vigueur, tout comme les restrictions réglementaires ou encore la perception d’une évolution défavorable du dinar algérien à moyen terme.

Les réalités économiques du marché officiel et du marché informel
La structure actuelle du marché de change algérien crée un écart systémique entre les cotations officielles et les prix réels appliqués dans les échanges non régulés. À titre d’exemple, le yuan chinois (CNY) est à 31,5 DZD dans les squares, contre seulement 18,23 DZD dans les relevés de la Banque centrale. Le dinar tunisien (TND) atteint 77 DZD sur le marché informel contre 44,27 DZD au taux officiel. Même constat pour le riyal saoudien (SAR), affiché à 61,5 DZD (vente parallèle) contre 35,35 DZD officiellement.
Cet écart structurel n’est pas spécifique à l’Algérie, mais se manifeste souvent dans les économies où la convertibilité du compte capital est limitée. Il génère des distorsions importantes, aussi bien pour les entreprises que pour les particuliers, surtout dans le cadre de transactions internationales ou de transferts de fonds.
Devises | Marché officiel | Marché parallèle | |
étrangères | Vente | Achat | Vente |
Euro (€) | 150,12 | 258 | 262 |
Dollar US ($) | 132,56 | 235 | 237 |
Livre Sterling (₤) | 176,53 | 296 | 301 |
Dollar CAN ($C) | 95,98 | 158 | 162 |
Franc suisse (CHF) | 160,43 | 275,5 | 279 |
Yuan chinois (CNY) | 18.23 | 31,5 | 31,5 |
Dirham EAU (AED) | 36,09 | 62 | 62,5 |
Dinar tunisien (TND) | 44,27 | 76,5 | 77 |
Riyal Saoudien (SAR) | 35,35 | 60,5 | 61,5 |
Le dirham des Émirats arabes unis (AED), moins exposé médiatiquement, affiche également une forte disparité : 62,5 DZD à la vente parallèle contre 36,09 DZD au niveau interbancaire. L’ensemble de ces chiffres met en évidence une réalité où le marché parallèle fonctionne comme un baromètre officieux du pouvoir d’achat du dinar algérien à l’international, en l’absence d’une convertibilité libre.
Ainsi, au moment où les autorités maintiennent une politique de gestion rigoureuse des réserves en devises et du solde de la balance des paiements, les écarts de change entre les deux marchés continuent de se creuser. Et, avec l’euro qui atteint un nouveau record, la double cotation du dinar ne semble pas près de disparaître.